Des bouts de doigts, une guirlande et un conte de bouddha

Publié le par acila

Son nom était Angulimal. Angulimal signifie un homme qui porte une guirlande de doigts humains.
Il avait fait le voeu de tuer mille personnes et de chaque personne il prendrait un doigt afin de pouvoir se souvenir combien de personnes il avait tué et il ferait une guirlande de tous ces doigts.


Dans sa guirlande de doigts il avait neuf cent quatre-vingt-dix-neuf doigts, seul un manquait. Et ce doigt manquait parce que sa route avait été fermée; personne ne passait plus sur ce chemin. Mais Gautama Bouddha est entré sur cette route fermée. Le roi avait mis des gardes sur la route pour empêcher les gens, particulièrement les étrangers qui ne savaient pas qu'un homme dangereux vivait par delà les collines. Les gardes ont dit à Gautama Bouddha: "Cette route ne doit pas être empruntée, vous devrez suivre un itinéraire un peu plus long, mais il vaut mieux rallonger votre route plutôt qu'entrer dans la gueule de la mort elle-même, c'est l'endroit où vit Angulimal. Même le roi n'a pas assez de cran pour venir sur cette route. Cet homme est simplement fou.
"Sa mère avait l'habitude d'aller le voir, elle était la seule personne qui avait l'habitude d'y aller de temps à autre, mais même elle s'est arrêtée. La dernière fois qu'elle y est allée il lui a dit: "maintenant seul un doigt me manque et juste parce qu'il se fait que vous êtes ma mère, je veux vous avertir que si vous venez une fois encore, vous ne repartirez pas. J'ai désespérément besoin d'un doigt, jusqu'ici je ne vous ai pas tuée parce que d'autres gens étaient disponibles, mais maintenant personne ne passe plus sur cette route sauf vous. Je veux donc vous avertir que la prochaine fois où vous venez, ce sera votre responsabilité, non la mienne." Depuis ce temps là sa mère n'est pas venue."


Les gardes dirent à Bouddha: "Ne prenez pas inutilement ce risque." Et savez-vous ce que Bouddha leur a dit ? Bouddha a dit: "Si je n'y vais pas alors qui ira ? Seules deux choses sont possibles: ou bien je le changerai et je ne peux pas manquer ce défi; ou je lui fournirai un doigt pour que son désir soit accompli, de toute façon je vais mourir un jour. Donner ma tête à Angulimal aura au moins servi à quelque chose, autrement un jour je mourrai et vous me mettrez sur un bûcher funéraire. Je pense qu'il est mieux d'accomplir le désir de quelqu'un et lui apporter la paix intérieure. Ou il me tuera ou je le tuerai, mais cette rencontre va arriver; montrez-moi le chemin."


Les gens qui avaient l'habitude de suivre Gautama Bouddha, ses proches compagnons, ceux qui étaient toujours en compétition pour être tout près de lui, ont commencé à ralentir et bientôt il y avait des kilomètres entre Gautama Bouddha et ses disciples. Ils voulaient tous voir ce qui allait arriver mais ils ne voulaient pas être trop proche.
Angulimal était assis sur son rocher, observant, il ne pouvait pas en croire ses yeux. Un très bel homme, d'un charisme immense venait vers lui. Qui pouvait être cet homme ? Il n'avait jamais entendu parler de Gautama Bouddha, mais même le coeur dur d'Angulimal a commencé à sentir une certaine douceur envers l'homme. Il semblait si beau, venant vers lui. C'était le petit matin... une brise fraîche, le soleil montait, les oiseaux chantaient et les fleurs s'étaient ouvertes; et Bouddha venait de plus en plus près.


Finalement Angulimal, avec son épée nue dans la main, a crié: "'Arrête-toi !" Gautama Bouddha était juste à quelques pas et Angulimal a dit: "Ne fait pas un autre pas de plus parce qu'alors la responsabilité ne sera plus la mienne. Peut-être ne sais-tu pas qui je suis !"
Bouddha dit: "Savez-vous qui vous êtes ?"
Angulimal dit: "Là n'est pas la question. Ce n'est ni le lieu, ni le moment pour discuter de telles choses, ta vie est en danger !"
Bouddha dit: "Je pense autrement; "Ta" vie est en danger."

Cet homme dit: "J'avais l'habitude de penser que j'étais fou, tu es simplement fou. Continues à t'approcher. Ne dites pas alors que j'ai tué un homme innocent. Tu sembles si innocent et si beau que je veux que tu retournes, je trouverai quelqu'un d'autre. Je peux attendre; il n'y a aucune hâte. Si je suis arrivé à neuf cent quatre-vingt-dix-neuf... c'est seulement une question d'un de plus, mais ne me force pas à te tuer."
Bouddha dit: "Tu es absolument aveugle, tu ne peux pas voir une chose simple, je ne me déplace pas vers toi, tu te déplaces vers moi."
Angulimal dit: "C'est la folie pure ! N'importe qui peut constater que tu te déplaces et que je suis debout sur mon rocher. Je n'ai pas bougé d'un seul pouce."


Bouddha dit: "Balivernes ! La vérité est que depuis le jour où je me suis réalisé, je ne me suis plus déplacé d'un seul pouce, je suis centré, complètement centré, aucun mouvement. Et ton mental se déplace continuellement, il tourne en rond sans arrêt et tu as le cran de me dire de m'arrêter ! Toi, arrêtes-toi ! Je me suis arrêté il y a longtemps."


Angulimal dit: "Il semble que tu es impossible, tu es incurable. Il est certain que tu vas être tué. Je me sentirai désolé, mais qu'y puis-je ? Je n'ai jamais vu un homme aussi fou."
Bouddha s'est approché très près et les mains d'Angulimal tremblaient. L'homme était si beau, si innocent, si sincère. Il en était déjà tombé amoureux. Il avait tué tant de personnes.... Il n'avait jamais ressenti cette faiblesse; il n'avait jamais su ce qu'est l'amour, pour la première fois il était plein d'amour. Ainsi il y avait une contradiction, la main tenait l'épée, prête à tuer la personne et son coeur disait: "Rengaine l'épée dans son fourreau."
Bouddha dit: "Je suis prêt, mais pourquoi ta main tremble-t-elle ? Tu es un si grand guerrier, même les rois ont peur de toi et je suis juste un pauvre mendiant. Mis à part le bol à mendier, je ne possède rien. Tu peux me tuer et je me sentirai immensément satisfait qu'au moins ma mort ait satisfait le désir de quelqu'un, ma vie a été utile, ma mort a aussi été utile. Mais avant que tu ne coupes ma tête, j'ai un petit désir et je pense que tu m'accorderas un petit désir avant de me tuer. "
Devant la mort, même l'ennemi le plus dur permet l'accomplissement de n'importe quel désir.


Angulimal dit:" Que veux-tu ? "
Bouddha dit: "Je veux simplement que tu coupes d'un arbre une branche pleine de fleurs. Je ne verrai jamais à nouveau ces fleurs; je veux voir ces fleurs de près, sentir leur parfum et leur beauté en ce soleil matinal; leur gloire."
Alors Angulimal a coupé avec son épée toute une branche pleine de fleurs et avant qu'il ne puisse la donner à Bouddha, Bouddha dit: "C'était seulement la moitié du désir; l'autre moitié c'est: remets, s'il te plaît la branche sur l'arbre."
Angulimal dit: "Je pensais dès le début que tu étais fou, mais c'est le désir le plus fou. Comment puis-je remettre cette branche ? "
Bouddha dit: "Si tu ne peux pas créer, tu n'as aucun droit de détruire. Si tu ne peux pas donner la vie, tu n'as pas le droit de donner la mort à n'importe quel être vivant."

Un moment du silence et un moment de transformation ... l'épée est tombée de ses mains, Angulimal est tombé aux pieds de Gautama Bouddha et il a dit: "Je ne sais pas qui tu es, mais qui que tu sois, emmène-moi dans le même espace que celui dans lequel tu es, initie moi."

À ce moment-là les disciples de Gautama Bouddha étaient arrivés plus près, tout près. Voyant que maintenant Gautama Bouddha était debout devant Angulimal, il n'y avait plus aucun problème, aucune crainte, bien qu'il n'ait eu besoin que d'un doigt. Ils étaient tout autour et lorsque Angulimal est tombé aux pieds de Bouddha, ils sont immédiatement venus tout près. Quelqu'un a soulevé la question: "n'initie pas cet homme, c'est un meurtrier et il n'est pas un meurtrier ordinaire, il a assassiné neuf cent quatre-vingt-dix-neuf personnes, toutes innocentes, toutes des étrangers, elles ne lui avaient fait aucun mal, il ne les avait même jamais vus auparavant !"
Bouddha dit de nouveau: "Si je ne l'initie pas, qui l'initiera ? Et j'aime l'homme, j'aime son courage. Et je peux voir un énorme potentiel en lui, un homme seul se battant contre le monde entier. Je veux cette sorte de gens, qui peuvent résister au monde entier. Jusqu'ici il résistait au monde avec une épée; maintenant il résistera au monde avec une conscience qui est beaucoup plus aiguë que n'importe quelle épée. Je vous ai dit qu'un meurtre allait être commis, mais ce qui n'était pas certain, c'est qui allait être assassiné. Ou j'allais être assassiné, ou c'était Angulimal. Maintenant vous pouvez voir qu'Angulimal est assassiné et qui suis-je pour juger ?"
Il initia Angulimal.
La question n'est pas de savoir si quelqu'un est digne ou pas, la question est de savoir si vous avez la conscience, l'abondance d'amour, alors le pardon en sortira spontanément.

Ce n'est pas un calcul, ce n'est pas de l'arithmétique.
La vie est amour et vivre une vie d'amour est  la seule vie de prière, de paix, la seule vie de gratitude, de magnificence, de splendeur.


Osho, Extrait de: The Great Pilgrimage: From Here to Here, Chapitre 24
Osho.com

 

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